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21 août 2005 7 21 /08 /août /2005 23:00
Fin avril 2004, Marie a replongé avec JM et s’est sentie « de nouveau emprisonnée dans cet inexorable tourbillon »…
Je l’ai quitté de nouveau.
J’appréhende de voir Thibaud demain.
Non, je n’ai pas peur en fait. Ça me trouble. J’ai peur qu’il entende Michel chantonner et qu’il sache, pour la nuit dernière. En même temps, je m’en fous, qu’il souffre, j’ai assez réfléchi sur lui et ses mauvaises manières. Je me demande si Robert a raison, que je veux me venger des hommes.
D’un homme, de mon père ?
Oui, c’est dur d’être belle, c’est trop facile. […]
J’en ai marre d’être lisse, douce et gentille. Je veux devenir méchante, emmerdeuse et piquante.
Je lui réponds après avoir lu une biographie de Colette.
Colette, telle que je la perçois à travers ces bribes de vie, te ressemble. (Elle me ressemble aussi.) Tu souffres parce que tu es encore sous le coup du jugement de Thibaud : ceux qui croient romantiquement (sans l’avoir vécu) que leur énergie amoureuse (qu’ils tiennent sous le boisseau) peut se canaliser toute entière dans l’histoire d’un couple. La différence entre nous, c’est que je suis un homme et que mes errances amoureuses sont socialement acceptables, absoutes de tout « sens moral ». Alors que toi tu es supposée te plier à la norme sociale, devenir la propriété d’un homme, choisir une fois pour toutes le visage, les mains et la queue qui te donneront du plaisir. Il y a de quoi avoir la haine, et j’espère bien que tu vas devenir méchante ! ;-)
Je ne crois pas que tu aies envie de te venger des hommes, mais plutôt du jugement social qu’ils transportent avec eux, de la manière dont ils veulent prendre en charge ta vie, te dicter ta conduite, avec leurs « mais voyons tu es libre ma chérie ! » Dans le sentimentalisme romantique, dans l’effusion de tendresse, on peut laisser s’infiltrer tellement de violence dominatrice.
Je ne dis pas que je te ressemble pour te mettre dans mon camp (ni mon lit de camp). C’est quelque chose de clair pour moi depuis notre dernière rencontre. Je retrouve la Marie que j’aime quand tu écris (sans même oser l’écrire) que tu as refait l’amour avec JM et que tu l’as quitté sans état d’âme. De même que j’ai aimé te regarder, face au miroir, quand tu avais envie de jouir en prenant mon corps comme un jouet. Je n’ai pas besoin de la jouissance pour t’aimer, même si je suis en demande incessante de plaisir et de jouissance. Pour moi, aujourd’hui, la rencontre amoureuse est un rendez-vous avec soi-même, pas une histoire de couple… (Décider avec qui on a envie de vivre, c’est un tout autre projet.) Le regard des autres — frustrés, envieux, nostalgiques, enchaînés — n’a rien à voir là dedans.
Je me sens libre de t’aimer, sans aucune condition, sans te prendre, même si tu ne veux plus de fusion sexuelle avec moi. Et je me battrai toujours (y compris contre moi-même) pour que tes désirs profonds soient respectés.

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J’adore tout ce que tu écris !!
Je vais aller lire Colette…
Je t’aime !
;-)
Marie
Un soir de nouvelle lune, je lui écris :
Ce soir, la lune va cacher sa lumière et toi tu resteras invisible et silencieuse. Mais je ne vais pas m’épuiser à marcher dans la pénombre. J’attends le retour de ta lumière. Comme un lac tranquille je laisse venir les rayons qui friseront la surface.
Toutefois, je lui rends visite, le 16 mai 2004, au terme d’une journée épuisante pour nous deux, et je la trouve dans un état de prostration affective. Un dîner un peu agité avec sa mère et sa sœur, le soir, puis la présence d’un ami commun dans la chambre voisine ne facilitent pas les choses. Son odeur même m’indispose, et je crois que c’est réciproque. Je quitte son domicile tôt le matin, avant qu’elle ne se réveille, laissant un petit mot pour m’excuser de ce départ en catimini. Elle me dira plus tard qu’elle avait peur. Elle finit par m’écrire qu’elle est de nouveau avec Jean-Marie, et conclut, le 22 mai 2004 :
Laisse moi tomber. Je ne veux plus aliéner un homme, plus jamais. Je veux que les êtres soient libres, et qu’ils m’aiment librement, et que j’aime librement, même si c’est difficile.
Cette fois j’ai bien compris que le cercle était bouclé et que je ne devrais plus répondre à ce que jee crois être des appels. Mon téléphone portable finira au fond d’un tiroir.

Il m’a fallu quelques semaines encore pour vraiment « laisser tomber ». Je l’ai aussi sentie tomber, mais cette chute fait partie d’une histoire qui ne m’appartient pas.
Aristophane est coupable d’associer désir et manque parce que sa lecture implique une définition de l’amour comme quête alors qu’il n’y a rien à trouver. Dévots de son enseignement, les sujets se perdent dans le désir d’un objet introuvable parce qu’inexistant, fantasmagorique, mythique. Parce que fictive, la moitié perdue ne se retrouve jamais.

Michel Onfray in « Théorie du corps amoureux — Pour une érotique solaire »
Un jour, je me suis de nouveau senti léger, emporté dans un courant ascendant…

[Suite]

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