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14 janvier 2006 6 14 /01 /janvier /2006 23:39
Troisième sommet

Muriel vit seule avec sa mère depuis la mort du père. C’est peut-être parce qu’il terrorisait les deux femmes, dans ses crises de démence alcoolique, qu’elle n’a jamais osé aborder un homme. À 29 ans, elle travaille au guichet des réclamations d’une administration. Toujours élégante, maquillée, de longs cheveux noirs bouclés, une poitrine arrogante, elle a souvent reçu des avances mais toujours retardé l’échéance d’un investissement affectif. Elle ne prononce jamais de mot dangereux comme « sexe », « désir », « liberté » ; elle a fait siennes les opinions conservatrices de son entourage. Elle m’énerve. Elle est charmante. Moi je la trouve plutôt moche, avec sa tête de gouine, ses griffes peinturlurées, son gros cul serré dans des robes ridicules et ses nibards monstrueux enfermés dans de la dentelle noire.

Ce n’est pas grave, elle m’aime bien : elle m’apporte des petits-fours de la pâtisserie la plus chère de la ville. D’ailleurs ce n’est pas moi qui l’intéresse, mais l’Amante. (Moi j’ai mes adresses et je fais ne pas dans la dentelle.)

Un jour, les deux femmes partent en vacances dans de la famille à elle au bord de la mer. Je ne sais pas trop ce qui s’est passé, sauf qu’elles ont fait du naturisme free-lance et dormi dans le même lit. L’Amante me met plutôt au courant de son petit flirt avec un homme, mais elle m’avertit que Muriel n’a plus de complexes avec son corps, et que par conséquent s’est mise en tête de perdre son innocence avec un homme.

Je ne sais pas si elles m’avaient désigné comme étalon. Il se trouve qu’un jour nous étions allongés tous les trois sur un divan, Muriel entre nous, et nous avons commencé à la caresser. Sa peau est très douce et je découvre que des lèvres charnues peuvent être incroyablement savoureuses. En tout cas elle ne se lasse pas de prendre les nôtres, sans relâche, et en retour nous la couvrons de caresses. J’ai beau être le plus vertueux des hommes, dans une telle situation le désir finit par pointer son nez. Je plonge les mains à la recherche du temps perdu (pour elle). Toutes ces couches de vêtements finissent par m’énerver. Pour lancer le mouvement, je jette mon peignoir au bas du lit. L’Amante ne tarde pas à m’imiter. Nous voici nus comme des vers, à l’assaut de cette poupée mal ficelée. Quand elle se tourne du côté de l’Amante, sans même s’être donnée le temps d’admirer ma virilité, je reconnais qu’elle a bien perdu toute gêne vis à vis du corps féminin. Ses mains sont fortes et ressemblent à celles d’un homme, ce qui me plaît bien en la circonstance. Je crois qu’elle rêve d’avoir un pénis pour assouvir son désir de la femme qu’elle a pris dans ses bras. Alors je lui prête le mien en le glissant bien dur dans sa main. Un peu surprise l’espace d’une seconde, elle ne tarde pas à le brandir comme un gode pour l’amener à destination. Le jeu s’arrête là, car nous n’avons pas osé. Après son départ nous avons fait l’amour furieusement.

Quelques semaines plus tard, elle revient un soir où je suis seul. Elle m’explique qu’elle a commencé à prendre la pilule et se sent prête au grand saut… Cette fois, nous sommes nus sur le lit. Je caresse longuement sa peau satinée et nous restons allongés ainsi, plus d’une heure, mon sexe bien au chaud dans sa main, à écouter des musiques douces. Puis elle me laisse venir sur elle et la pénétrer lentement. Aucune résistance, elle adore se sentir remplie par un homme, bien que je n’aie pas l’impression de la remplir car son sexe me paraît immense. Nous avons gardé cette étreinte, presque sans bouger, pendant quelques minutes, puis je me suis détaché d’elle et nous nous sommes endormis. La voilà apaisée, elle qui croyait que ça devait faire terriblement mal et qu’elle allait saigner. Elle finit par me dire qu’elle a choisi de venir en son absence pour ne pas pas donner à l’Amante le spectacle de cette initiation sanglante.

La fois suivante, je la reçois avec l’Amante. C’est l’hiver, je me souviens d’un feu de cheminée et des reflets de cuivre sur les corps des deux femmes. On se croirait dans un film de Pasolini que je n’ai pas encore vu. Mais c’est bien mieux en vrai, quand les lèvres, les mains et les sexes ont perdu toute contenance. J’apprécie le parcours d’initiatrice de l’Amante : sans parler, elle a commencé par apprendre à Muriel comment caresser le sexe de son homme : bien dérouler le prépuce, serrer assez mais pas trop, attention là-bas c’est fragile, puis on peut y mettre la bouche, oh ces lèvres gourmandes je n’ai jamais connu ça ! Doucement les dents, juste une touche légère… On enchaîne sur l’accouplement, l’homme sagement allongé sur le dos, la femme qui se plante au sommet du drapeau. Mais Muriel n’est pas prête à s’attacher ainsi. Elle veut d’abord prendre du plaisir avec l’Amante. Alors les femmes me montrent un moment ce que font des femmes entre elles. Enfin, pas tout à fait, car je les sens plutôt chacune à essayer de jouer l’homme sans avoir l’équipement pour une telle expérience. Dans mon souvenir, cette brève rencontre entre femmes me paraît loin de ce que des femmes racontent ou inventent de leurs jeux amoureux. Il est probable que la présence d’un homme soit une cause de perturbation. Pour être franc, je sens qu’il y a un vide à combler et que je pourrais me rendre utile.

Muriel a une main de femme et une main d’homme qui jouent ensemble sur son sexe grand ouvert. J’aime cette compétition, à qui lui fera le mieux cambrer les reins et pousser des petits cris. Ses seins sont gonflés à bloc et je joue (avec un plaisir limité) à les mordre. Puis elle m’entraîne sur elle. La suite ne vaut pas la peine d’être racontée. Non, elle n’a pas joui dans le triangle, mais nous reprendrons le jeu plusieurs fois en aparté et elle connaîtra d’autres accomplissements. L’Amante ne veut plus se joindre à nous car elle m’affirme qu’elle n’éprouve aucun attrait pour les femmes en général, et encore moins pour Muriel en particulier. Son seul rôle a été de détourner le désir de notre amie pour l’orienter vers un homme. Une fois la barrière brisée, répéter la mise en scène serait sans intérêt.

Maintenant, Muriel aime que je sois allongé pendant qu’elle me fait l’amour. Son sexe est d’une puissance musculaire jamais égalée. Un jour, elle m’amène à l’orgasme, puis elle se dégage et prend tout de suite dans sa bouche mon arbre replié, encore gluant des fluides échangés. La sensation est si forte qu’il reprend vite sa forme avantageuse. Un autre jour, elle me prend tout de suite en bouche pour goûter ma sève, « saveur d’océan » dit-elle émerveillée, comme si elle venait de déguster un petit-four de la pâtisserie Ducon. C’est avec elle que j’apprends à plonger la langue dans les replis mystérieux d’un jardin d’amour : elle sent bon, elle passe tellement de temps à se laver ! Elle aurait bien pris ma main entière, si j’avais osé.

J’ai vécu d’autres triangles avec femmes. Aucune histoire ne ressemble à l’autre, mais le plus souvent j’ai été fou de plaisir pendant les « préliminaires », alors que tout est redevenu banal quand une des femmes s’est accaparée mon sexe et mon attention. C’est une époque où je croyais qu’on ne pouvait pas faire l’amour sans passer par un rituel de pénétration et d’orgasme. Rétrospectivement, je crois que j’ignorais tout de « l’énergie féminine » que ces femmes auraient pu éveiller en moi. Au point de décliner, deux fois et demie, des invitations à une petite fête « entre femmes »…

Écrit un soir de pleine lune, janvier 2006
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commentaires

T
Je me demandais si l'Amante était bien celle que je croyais. C'est bien elle, je l'ai reconnue. Tu brouilles les pistes, mais je m'y retrouve quand même ;-)
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